--[PILE]-- Kelen
Il semblerait que vers sept ans je sois devenue moi.
Avant cet âge, j'étais sans être.
A sept ans, je les ai détesté.
Ils m'ont dit d'abandonner mes amies, ma vie, ma ville, ma région pour commencer autre chose ailleurs au milieu de tours de béton tout juste oxygénées...
J'ai cru étouffer dans cette ville qui m'était inconnue.
Je suis devenue "moi" quand j'ai su que j'étais seule.
Lorsque l'on a tout à recréer, on se heurte à la réalité.
Efforts pour s'intégrer, s'immmiscer dans la vie des autres.
Efforts pour aller vers les autres, pour se réinventer.
J'ai haï ceux qui ont anéanti mes repères, l'évidence de mon existence et le confort de mes petites années.
A sept ans et un mur devant soi. Ce ne sont pas mes larmes de crocodiles qui m'ont sauvée.
Il était temps de construire des défenses en béton armé...
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--[FACE]-- Maël
Le béton appel le béton.
Construisez un mur, le voisin en fera un plus grand pour que sa vue ne soit pas gâché par le votre.
Se sentir comme une valise en nubuck dans les bagages parentaux, ça vous tanne le cuir.
C’est l’empreinte qui fait de l’enfant un dur à cuir.
Ne pas être écoutée, n’être qu’une pièce montée que l’on rassure comme un chiot perdu.
Être traité comme moins qu’un gosse réfléchi et au final devoir se débrouiller comme un adulte car rien ne suit. C’est un insupportable paradoxe, car on vous traites toujours à l’opposé de l’état d’esprit dans lequel vous êtes.
Comme un gosse quand vous êtes plus adulte que les adultes.
Comme un adulte quand vous avez besoin du réconfort d’un gosse.
Au final ce n’est qu’un truc de grande personne pour ne pas voir leur propre incapacité à se gérer eux-mêmes et plus encore la vie de ceux qui dépendent d’eux.
Et après ça comment vouloir encore dépendre affectivement de quelqu’un si même ceux qui sous adrénaline sont sensé savoir pulvériser un mur de béton pour vous sauver… Comment croire que ceux qui peuvent le plus faire attention à vous, vous abandonnent à vous-même.
C’est étouffant et l’on étouffe tout ce qui fait qu’un jour on sera pareil.
On brise le cercle.
Et en le faisant s’en rapproche tant.
Et ça encore c’est la faute des parents.
L’innocence se perd.
Et ça vient toujours d’eux.
Parce qu'après même les clôtures de squares aérés ressemblent à de sordide palissade de ruelles malfamés.